Histoire de l’esclavage Critique du discours eurocentriste Vol. 5
Édition : Menaibuc
ISBN : 2353490433
Format du livre : 15 cm*21 cm
Poid : 0g
EAN : 978-2353490431
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Afin de garantir un futur démocratique aux générations à venir, l’histoire des hommes – que nous avons aujourd’hui le devoir et la responsabilité de leur transmettre puisque c’est la leur – ne saurait continuer à s’écrire dans l’obscurantisme idéologique que subissait encore il y a moins de 50 ans le Professeur Cheikh Anta Diop lorsqu’il entreprit le travail révolutionnaire de restauration de la Conscience Historique Africaine et au-delà celle de l’Humanité.
Tous les pans de l’histoire africaine dans sa pluri dimensionnalité devront être revisités avec objectivité scientifique. L’accent sera tout particulièrement mis sur les impacts négatifs cumulés des faits historiques de ces 500 dernières années sur les développements économique, technologique, politique, démographique, culturel, psychologique et social. Ces facteurs doivent être pris en compte dans l’explication des réalités contemporaines.
A travers l’ « Histoire de l’Esclavage : critique du Discours Eurocentriste », Jean Philippe OMOTUNDE tente de corriger la falsification de l’historiographie des razzias négrières et de l’esclavage. Nombreuses questions sont abordées dans ce livre dont entre autres :
l’influence des berceaux historiques des sociétés issues du nomadisme et du patriarcat
la nature du contact Europe/Afrique à l’époque impériale
l’importance de la Résistance africaine dans le processus qui a conduit aux Abolitions.
Cet ouvrage de Jean Philippe OMOTUNDE est aussi une contribution au combat contre le négationnisme.
Sujet: Histoire de l’Esclavage : critique du Discours Eurocentriste -
Omotunde
Dim
31 Juil 2011 - 10:13
Interview de
JP Omotunde
http://www.africamaat.com/Histoire-de-l-Esclavage-critique
Dans son dernier ouvrage, Jean Philippe OMOTUNDE tente de corriger la
falsification de l’historiographie des razzias négrières et de l’esclavage.
Votre ouvrage est sous-titré « critique du discours eurocentriste ».
Pouvez-vous nous expliquer de quoi il s’agit ?
JPO : J’ai écrit cet ouvrage pour montrer qu’il existe un discours
eurocentriste sur l’histoire des razzias négrières et de l’esclavage et tout
comme celui sur l’Egypte antique, il est profondément fallacieux. D’ailleurs
comme on l’a vu récemment, le lancement de l’ouvrage « Les traites négrières :
essai d’histoire globale » de l’historien nantais Olivier Pétré Grenouilleau, a
été quant au fond, un vaste show médiatique qui a allié désinformation et
calomnie, cela sur la base d’un monologue historiographique qui au finish, a
totalement privé le public de l’opportunité d’apprécier l’antithèse de cet
ouvrage. Le résultat, le professeur Steven Hahn le reconnait officiellement
dans le Monde Diplomatique, « la traite des Noirs fait l’objet d’un débat
acharné... le commerce négrier est devenu un sujet explosif sur lequel la
désinformation n’épargne même plus un public instruit ». Que constatons-nous ?
Les descendants des victimes, qui n’ont toujours pas eu l’opportunité
d’exprimer ouvertement leur point de vue doivent, après une longue période de
silence, affronter maintenant la désinformation médiatique. De plus, les
historiens qui ont rallié les thèses eurocentristes, ne font que recycler les
vieux arguments sans fondement des anciens financiers européens des razzias.
Face à une telle mascarade, il était important de réagir en présentant aux
jeunes générations panafricaines la nature de notre point de vue et surtout
d’indiquer le « sens de la lutte contre la falsification de l’histoire des
razzias négrières et de l’esclavage », un peu comme l’avait fait sur un autre
thème, le professeur Théophile Obenga.
Cette problématique a pourtant fait l’objet de grandes discussions lors de
la première commémoration en 2006 de l’abolition de l’esclavage. Qu’est ce que
vous remettez en cause ?
JPO : En fait, depuis le vote de la loi Taubira en 2001, il s’est passé
beaucoup de choses. Premièrement, la procédure découlant de cette loi a été
immédiatement « formolée ». Deuxièmement, on a tout de suite validé
médiatiquement contre les descendants des victimes, le discours argumentaire
des « criminels » (négriers, financiers, ecclésiastiques…) sans se soucier de
l’esprit de la Loi, qui interdit normalement un tel fait. Simone Weil l’a
d’ailleurs déjà dit sur un autre registre, « on ne
peut valider contre la victime, les accusations des meurtriers ».
Troisièmement, la question de l’enseignement scolaire de cette page d’histoire
européenne ayant commencé à déranger les consciences d’un certain establishment
français, on a assisté à la construction à grand renfort médiatique, d’une
argumentation que l’on peut qualifier de « dédouanement » de l’entreprise
esclavagiste française. Le concept de « mémoire partagée » et les thèses
fantasmagoriques portant sur les « négriers africains », la « traite interne
africaine » et l’« anachronisme » en sont les conséquences. Quatrièmement, les
critiques épicées de l’humoriste Dieudonné sur l’hypocrisie régnante dans la
gestion nationale de la mémoire de l’esclavage a mis mal à l’aise
l’establishment parisien qui a contre-attaqué médiatiquement tout en réactivant
à la hâte, les procédures gelées jusqu’alors. C’est donc 5 années après le vote
de la loi Taubira, que l’on a officiellement commémoré cette page d’histoire.
Dans le même temps, plusieurs attaques en « raz de montagne » ont défrayé la
chronique. Comme exemple, nous pouvons citer les multiples tentatives
d’abrogation de la loi Taubira et le vote de la loi reconnaissant les bienfaits
de la colonisation.
Qu’est ce qui vous semble être le plus problématique ?
JPO : Les historiens occidentaux ont totalement
évacué du champ de la recherche historiographique, la notion de « résistance
africaine » face à l’oppression impérialiste pour échafauder leur théorie de la
« collaboration ». Voilà pourquoi par exemple, ils passent sous silence
l’encerclement du continent avec leurs centaines de châteaux forts puissamment
armés. Ainsi on a presque l’impression, à la lecture des récits de Grenouilleau
et consorts, que les africains attendaient désespérément leurs amis négriers
européens. Dans ce genre de drame humain, nous étions habitués au contraire. On
le voit pour l’histoire de France où la notion de « résistance » est dopée à
l’EPO historiographique et politique. Et même si le gaz qui fut utilisé dans
les chambres à gaz nazis fut inventé par un scientifique juif, même si 160 000
soldats juifs faisaient partie intégrante de l’armée allemande, on a jamais vu
personne parler de « collaboration juive » à la Shoah. Mais pour l’Afrique, on
pousse la thèse de la « collaboration » au paroxysme médiatique au point que certains
afro-caribéens et afro-américains, pris au piège, reprochent aux africains de
les avoir vendus.Alors que pour tous, le drame les rassemble, les unit
même, pour nous, ce drame nous divise car le récit qui en a été fait
par l’Europe est mesquin, fallacieux et
médiocre. D’où l’importance du travail que doivent accomplir en toute
objectivité, les historiens d’ascendance africaine pour réparer le mal. Un
autre point me semble être essentiel. Il n’a pas concevable que les descendants
des victimes aient le même regard historique que les descendants des négriers,
tout autant que l’hypocrisie oxydera l’analyse historiographique. Car cela
décrédibilise le « Crime ». Voltaire disait que ceux qui vendent les leurs sont
plus condamnables que l’acheteur. Vous comprenez maintenant pourquoi les
idéologues européens falsifient les faits pour « camper » sur le terrain de la
collaboration.
A vous entendre, on a l’impression que vous voulez dédouaner les africains
de leur part de responsabilité. Qu’est-ce qui vous permet d’affirmer cela ?
JPO : Dans cette histoire, l’establishment français est juge, parti et
détenteur de l’arme médiatique ce qui complique inexorablement les choses. Et
malheureusement, la puissance politique et médiatique des pays du sud n’égale
pas celle des pays du nord. Du coup, ils ont carte blanche pour échafauder leur
discours eurocentriste voire calomnieux et lancer les thèmes médiatiques.
Ecrire, comme je l’ai vu dans les journaux, de fausses vérités telle que les «
Africains se capturaient et s’asservissaient entre eux » en passant sous
silence que le mot « esclave » désigne expressément des
blancs nommés les « Slaves » qui étaient régulièrement capturés par les rois
européens au moyen-âge, vendus et déportés à fond de cale de bateaux en tant
qu’esclaves aux Arabes à Venise, est profondément mesquin. Prétendre que
la capture et l’acheminement des captifs africains le long des côtes étaient
réalisés sans aucune aide des européens est encore se moquer du monde. Les européens ont fourni l’arme du crime (les fusils et les
balles), la logistique du crime (les carcans, les bateaux…) et le mobile du
crime. Quant à la thèse de l’esclavage en Egypte, permettez-moi de vous
dire que c’est une immense escroquerie. Il n’existe aucun déterminatif en
hiéroglyphe pour qualifier le mot « esclave ». A vrai dire, il ne s’agit pas de
charger ou de dédouaner l’Afrique, mais plutôt de [b]s’en tenir aux faits ![/b]
En accusant les autres d’être entièrement responsable de l’esclavage, n’êtes
vous pas en train de reproduire ce qui finalement vous semblez dénoncer ?
JPO : A la base, il s’agit simplement de cerner les faits. Cependant, à partir
du moment où l’on quitte le domaine de l’analyse historique stricte pour
accuser l’Afrique d’être responsable des événements, on nous place dans
l’obligation de répondre sans distinction, c’est-à-dire même aux Antillais et
aux Africains qui s’aventuraient à reprendre les thèses eurocentristes. Les
gens confondent volontairement « cadre culturel européen » et « cadre culturel
africain ». En Europe, vous avez le mot « Captif » et le mot « Esclave » qui
découle, ne l’oublions pas, du nom des « Slaves ». En Afrique antique et
impériale vous n’avez que le mot « Captif ». Dans le fond, parler « d’esclaves
» en Afrique revient à faire comme si on soutenait qu’en France sous Louis
XIII, il y avait des Samouraïs. Bien qu’il s’agisse de chevaliers chargés de
défendre leur roi, on ne peut utiliser ce mot pour l’histoire de France, car
entre la France et le Japon, les cadres culturels sont différents. Par contre,
on veut utiliser le même mot « esclave » pour l’Europe et pour l’Afrique, en se
référant à la seule définition donnée par Aristote et sans tenir compte de
l’éloignement des cadres culturels. Cela relève dans le fond, de l’entreprise
de l’escroquerie !
Bien que vous ne soyez pas un historien formé dans une université
occidentale, vos arguments sont très techniques. D’où viennent vos sources ?
JPO : Elles sont relativement variées. Il y a tout d’abord les documents
africains (correspondance des rois, récits et analyses de chroniqueurs et
d’historiens africains, examen des langues africaines…) puis viennent les
récits des explorateurs étrangers (arabes et européens), les récits des
négriers européens et le travail de recherche des historiens antillais,
américains et européens. J’utilise beaucoup les mémoires de thèse et les
comptes rendus des débats entre spécialistes, tels le Colloque sur l’esclavage
organisé par le CNRS et le Réseau Thématique prioritaire en 2006 à Paris et le
Séminaire national du 10 mai 2006 initié dans le cadre du Programme national de
pilotage émanant de la direction générale de l’enseignement scolaire.
Quelles sont vos propositions pour l’écriture d’une histoire africaine débarrassée
de ce que vous appelez les « jugements esthétiques » ?
JPO : Vous savez, le discours européen sur le passé africain s’arc-boute dans
un champ sémantique négatif et raciste dont les contours dépréciatifs passent
sous silence l’extraordinaire richesse civilisationnelle du continent. Du coup,
les jugements esthétiques européens qui en découlent, sont à la base de la
marginalisation systématique de l’histoire africaine du cours de l’histoire
universelle. C’est donc en réintroduisant l’histoire africaine dans le
cours de l’histoire humaine, à grand renfort de logique méthodologique, de
supports de médiatisation et de documentation scientifique, que nous
parviendront à faire tomber les barrières racistes. Dire, comme l’a
fait Monsieur Sarkozy que l’Afrique n’est jamais rentrée dans l’histoire
universelle, alors qu’Europe était une jeune femme africaine et que c’est son
frère qui a introduit l’écriture en Europe, est faire preuve d’ignorance. Que
dire encore du ind-Brazza qui fut déclaré par de Gaulle, capitale de la France
libre ?
Que pensez-vous de l’esclavage contemporain en Afrique subsaharienne qui lui
existe bien réellement ? N’est-ce pas là une preuve que l’esclavage a toujours
existé en Afrique ?
JPO : Avant l’arrivée des Arabes en Afrique, il n’y avait même pas de terme
pour mentionner le mot « esclave ». La langue nubienne et langue égyptienne qui
en découlait, n’en n’avaient pas. Mais avec l’arrivée des Arabes au VIIème
siècle et leur impossibilité de conquérir par la force la Nubie, ces derniers
vont ruser et proposer un accord de « non agression » appelé « Baqt » aux
nubiens, dans lequel on retrouve la première mention de livraison de captifs
destinés à l’esclavage. Par la suite, avec la progression des Arabes vers
l’ouest, c’est à ce moment que l’on a vu apparaître la pratique esclavagiste et
les razzias en Afrique. Mais ne croyez pas que les choses se soient passées
sans violence, avec la complicité tacite des peuples africains de l’époque.
Henry Morton Stanley témoigne par exemple, de l’hostilité farouche qu’a
rencontrée un trafiquant arabe nommé Hamed Ibrahim sur les terres des royaumes
du Rwanda et du Burundi. Aujourd’hui cet esclavage qui persiste en Afrique
subsaharienne est inacceptable et il en va de la responsabilité de l’Union Africaine
de régler définitivement ce problème. Autrement, à quoi sert cette organisation
?